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Les troisièmes élections présidentielles tunisiennes depuis la chute de Ben Ali s’annoncent mouvementées, et c’est le moins qu’on puisse dire. Depuis l’arrivée au pouvoir de l’ultra-conservateur Kais Saïed en octobre 2019, le climat social est très tendu. Et pour cause : des réformes jugées radicales par une partie de la classe politique, des emprisonnements incessants d’adversaires politiques et un rétrécissement inédit des libertés publiques.

Un premier mandat au bilan mitigé

Surnommé « Robocop » en raison de son caractère rigide, l’enseignant en droit constitutionnel de 66 ans, est en campagne pour un second mandat alors que le bilan de son premier est, pour le moins, mitigé. Les experts d’Amnesty International et d’autres analystes spécialisés de la scène politique tunisienne pointent du doigt des libertés de la presse étouffées, un paysage politique obstrué, une restriction généralisée des libertés publiques, ainsi qu’une baisse du pouvoir d’achat. Le premier mandat de Saïed est loin d’avoir tenu toutes ses promesses de campagne. Les défenseurs du régime imputent ces difficultés à la pandémie de COVID-19, à la montée du terrorisme et à la conjoncture internationale.

D’un autre côté, le régime revendique une certaine sécurisation du pays et une ouverture vers une société égalitaire, symbolisée par la nomination d’une femme à la fonction de Première ministre, un fait inédit dans le monde arabo-musulman.

Une gouvernance sous fond d’autoritarisme

Deux ans après son élection, la présidence de Saïed prend un tournant autoritaire, caractérisé par des décisions impopulaires, comme la dissolution de l’Assemblée nationale, remplacée par une gouvernance par ordonnances. L’opposition a alors dénoncé un « coup d’État constitutionnel » et une « confiscation illégale » du pouvoir. Parallèlement, une nouvelle Constitution renforçant les pouvoirs présidentiels a été adoptée par référendum, intégrant davantage l’islam dans la société tunisienne.

Une politique étrangère critiquée

La politique étrangère de Kaïs Saïed, jugée non africaine, a également été source de controverse. En 2023, il a qualifié les migrants subsahariens de « hordes de criminels » menaçant l’identité arabo-musulmane de la Tunisie, des propos qui ont suscité une vive polémique internationale. Sa politique de refoulement et d’emprisonnement des migrants en partance pour l’Europe est également critiquée.

Des suspicions d’élimination de rivaux politiques

Sur les 17 dossiers de candidatures envoyés à la commission électorale, seuls trois ont été retenus : celui de Kaïs Saïed, de Zuhair Maghzawi, et d’Ayachi Zamal. Les autres candidatures ont été systématiquement éliminées pour des raisons génériques. Ayachi Zamal, dont la candidature a été acceptée, fait face à des pressions judiciaires et a été condamné à 20 mois de prison, renforçant les accusations d’élimination de rivaux politiques pour asseoir son pouvoir.

Emprisonnements, rejets de candidatures et arrestations arbitraires, le régime tunisien de Kaïs Saïed apparaît très fragilisé à l’approche du scrutin présidentiel du 6 octobre prochain. Des suspicions pèsent également sur l’Instance Supérieure Indépendante pour les Élections (ISIE), accusée d’être à la solde du régime. À près de deux semaines de la présidentielle, le climat social est loin d’être rassurant.

Nguelifack Vijilin Cairtou

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