Un soir sombre au village Pimbè, situé dans l’arrondissement de Ngambè, département de la Sanaga Maritime, la famille d’Alain s’était réunie pour une veillée mortuaire en l’honneur de son cousin décédé. Cela faisait déjà trois ans qu’Alain avait été déclaré mort après des incidents tragiques dans le désert marocain. La douleur de sa disparition avait laissé des cicatrices profondes dans le cœur de ses proches, mais la vie avait continué, tant bien que mal.
Cette nuit-là, les chants et les prières s’élevaient sous une tente éclairée de bougies, l’atmosphère pesante marquée par la tristesse et la fatigue. Soudain, un murmure se fit entendre au loin, de plus en plus fort. Les regards se tournèrent vers l’entrée de la cour. Là, sous les lueurs vacillantes des lampes, une silhouette familière se profila. C’était Alain.
D’abord, certains pensèrent à une illusion. Mais quand il s’approcha, un cri de terreur résonna dans la foule. « Le revenant ! » hurla une vieille tante, avant de s’évanouir. Même l’oncle Jean, pourtant en béquilles, s’est soudain découvert des talents de sprinter pour sauter par-dessus le portail. La panique fut instantanée. La foule, bouleversée par la vue d’Alain qu’elle pensait mort, se précipita dans toutes les directions. Chaises renversées, cris et chaos remplissaient désormais la cour. Certains escaladèrent les murs, d’autres trébuchèrent en essayant de fuir, croyant être témoins d’un phénomène surnaturel.
Au milieu de cette débâcle, Alain, tout aussi confus, essayait de se faire entendre. Mais la peur avait déjà paralysé les esprits. Tapis dans l’ombre, à quelques encablures de son balcon, plongé dans la noirceur de la nuit, le vieux Ngantra, la quatre vingtaine sonnée, n’a pas bougé d’un iota. Il n’était pas du genre à paniquer. Il observait impassible la scène surréaliste.
D’un geste digne d’un détective, il alluma un puissant briquet qui dévoila la silhouette du fantôme présumé. Il en conclut que les fantômes n’ayant pas d’ombre, Alain n’en est pas un. Il se rapprocha de ce dernier qui lui raconta en un tête-à-tête stressant, les circonstances de son aventure qui révèlent qu’Alain a été donné mort effectivement, mais qu’au-delà de cette information qui avait couru, il n’avait pas, comme de nombreux compagnons de la route de l’immigration perdu la vie. Aujourd’hui vivant en Europe, il était de retour pour revoir sa famille.
Le vieux courageux pris le micro pour annoncer la bonne nouvelle :
- Ce n’est pas un fantôme, notre fils est bien vivant, sortez de vos cachettes et remercions le ciel.
Cette nuit-là, la veillée mortuaire se transforma en une scène inoubliable, entre peur et retrouvailles, entre deuil et fête. Cette histoire rocambolesque nous rappelle que parfois, la réalité dépasse la fiction, et que les retours inattendus peuvent provoquer des réactions hilarantes. Alors, la prochaine fois que vous assistez à une veillée mortuaire, gardez un œil sur l’entrée, on ne sait jamais qui pourrait faire un retour triomphal!
William NLEP
Images illustratives